lettre à Chipie

“L’obéissance soumet un homme à tous les habitants de la terre et pas seulement aux hommes mais aussi à tous les animaux”.
Saint François d’Assise.
Les mots ne suffisent pas à t’exprimer tout ce que tu as représenté pour nous, ton amour, ton intelligence, ta fidélité, ta détermination, tes expressions, ton élégance, il ne te manquait vraiment que la parole.
Je n’ai jamais connu, avant toi, cet “engouement” que tu déclenchais. Tout le monde, sans exception, et ce n’est pas une figure de style, ou parce que je suis aveuglée par l’amour que j’avais pour toi, y compris, ceux qui n’aiment pas les animaux, tout le monde craquait pour toi, tout le monde te voulait sur ses genoux pendant les repas, tu faisais le tour des genoux des uns et des autres.
personne ne disait rien, quand tu mettais les pattes sur la table. Je crois même qu’ils t’encourageaient. Chacun ému par ton espèce de charisme, si j’ose employer ce mot, ton air charmeur naturel et ta beauté il faut bien le dire.
Tu étais une très belle chihuahuate.
Vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ensemble, nous vivions à ton rythme, jusqu’à dormir dans ton lit.
Tu nous émouvais, même tes bêtises ne prêtaient pas à conséquence.
Les haricots verts n’ont plus ce goût que tu aimais tant et qui te faisait dresser les oreilles et hocher la tête.
Ta petite voix de gardienne du temple s’est tue
et nous nous sommes muets, assommés, anéantis de douleur, abandonnés, orphelins de toi.
Depuis sept mois, nous te savions condamnée, beaucoup trop jeune, le coeur, puis l’oedème pulmonaire,
jusqu’au dernier instant tu as lutté,
jusqu’au dernier moment on a cru que tu surmonterais la nouvelle crise,
et puis, mercredi 9 mars, sans avoir rien voulu manger, sauf tes médicaments, et après avoir sauté seule sur le canapé, tu t’es allongée et petit à petit ton coeur a commencé à ralentir son rythme, on y a cru. On a cru qu’il se calmait !
Les battements se sont faits plus rares et plus rares, j’ai vu ta “gueule” qui s’ouvrait et ta langue légèrement sortir… j’ai compris.
Ton maître t’a pris dans ses mains jusqu’à ton dernier souffle auquel on ne voulait pas croire.
Le soleil brille, j’ouvre la porte, en vain, tu n’es plus là.
Notre histoire fut belle. Nous pleurions, depuis quelques mois, ton ancêtre Hardy, qui nous a accompagnés quinze ans, et n’a souffert (c’est toujours trop) que deux semaines, c’était en juillet, nous étions à la campagne. Il est resté à Coulommiers.
Je ne pouvais pas vivre sans chien.
Avant il y avait eu, Biba, morte au même âge que toi, beaucoup, beaucoup trop tôt puis Snoopy (triste épisode d’un petit chien que nous avions voulu sauver de la SPA !)
Ma vie a toujours été entourée de chien.
Le premier entré dans ma vie s’appelait Bémol, un fox au caractère bien trempé, qui dès ma première visite, m’a mordu, apparemment doucement, jaloux de cette intruse qui dormait dans une grande valise ! je l’ai beaucoup aimé. Lui aussi mort en mars, en 1954, à 16 ans, et enterré dans le grand jardin de Draveil.
L’épagneul de papa, dont j’ignore le nom, les photos avec divers animaux, cochons, poules, tortues, les chiens, euh pas de chats ! on ne parle pas le même langage. Toi, non plus, tu ne parlais pas la même langue qu’eux.
Et puis Dora à Paris et Riki à Pérouse.
La liste est longue.
Malgré tout jamais nous n’avions ressenti cette complicité absolue, cette fusion. Tu étais ma fille, mon bébé, mon trésor, ma puce, mon petit bonheur, pépette, Chipette, Primprenelle, Marie Berthe, mon amour, ma passion, et tant d’autres noms tous aussi ridicules ou excessifs juste empreints de cet amour mutuel et “familial” inextinguible.
Lorsque la nuit allongée dans le lit, je sentais ton souffle chaud sur mon corps je me sentais apaisée. Tu passais des heures sur nos ventres pour ta sieste de l’après-midi. Tu n’aurais d’ailleurs vécu que dans nos bras si l’on t’avait laissé le choix.
Le matin, sans que je ne manifeste aucun signe, tu savais qu’on allait se lever, tu te réveillais et tu nous sautais dessus, des bisous, des léchouilles qui n’en finissaient plus et des petits massages, des caresses sans fin sans fin.
Quand nous rentrions, tu venais nous faire la fête,
tu venais…tu ne viendras plus.
Mon Dieu que la maison est vide.
Je te vois regarder le jardin par la baie vitrée.
Je te vois renifler les fleurs dans le jardin, et t’allonger pour profiter du soleil, toi la chihuahuate qui avait toujours besoin d’être “couverte” pour avoir chaud.
Le nombre de plaids que tu as eus !
Tu es le fruit d’une rencontre, comme l’on dit. Un après-midi n’y tenant plus, je suis entrée chez la vétérinaire lui demandant, éventuellement, si dans ses petits patients, il n’y avait pas des chihuahuas.
Il y a des années que je voulais un chihuahua. D’ailleurs parenthèse, nous avons toujours privilégié le bien-être de l’animal à notre préférence.
Le chihuahua était nons seulement mon préféré, mais il avait la taille qui correspondait à notre mode de vie et à ce que nous pouvions t’offrir. Qu’aurais-je fait d’un très gros chien ? Il n’aurait pas été heureux. Il faudrait quand même que les gens y pensent. Un chien, un animal n’est pas un jouet, j’en profite pour pousser un coup de gueule et un chihuahua n’est pas non plus, et surtout pas, un jouet pour un enfant ! j’ai vu tant d’horreurs !!!
Donc, je m’égare…
En bref, la vétérinaire me dit : «mais oui, je viens de faire une écographie à une petite chienne, elle attend des bébés».
Numéro de téléphone en poche, le soir même j’appelle.
Tu étais née cet après-midi-là !
Quatre jours plus tard, je venais te voir. Vous étiez deux filles, une marron, un peu boulotte et toi, blanche et noire, déjà svelte et élégante. J’ai eu un coup de foudre, en même temps qu’une morsure au mollet, à travers mes jeans, dont j’ai souffert pendant plusieurs semaines de ta maman qui craignait que je t’enlève.
Nous nous sommes revues, régulièrement jusqu’à quelques jours avant Noël 2007 que tu rejoignes définitivement la maison et que nous ne nous quittions plus jusqu’à ce que tu partes vers le paradis des animaux.
J’aurais fait (on aurait fait) des kilomètres pour toi. Nous venons de les faire. Il nous fallait, pour la première fois, trouver un endroit, digne de toi, digne de ta vie, de qui tu étais et de ce que tu représentais pour nous.
À côté de chez nous, il y a le célèbre cimetière des chiens d’Asnières, c’était pratique, proche, mais quelque chose me gênait. Et je ne parle pas du coût, soyons honnêtes !
Nous avons trouvé ce merveilleux jardin du souvenir. J’ai aimé cette idée d’association…
J’ai aimé dès le premier instant, cet endroit, beau, reposant, l’atmosphère qui régnait, de la bienveillance, de l’amour, de la nostalgie, du calme, de la sérénité, une magnifique lumière. Tu y seras bien.
Nous viendrons te voir et passer quelques heures assis sur un banc à l’ombre des arbres dans la spiritualité du lieu, dans cette campagne moi à qui elle manque tant.
Je parle en mon nom, mais tu sais que je ne suis pas seule à l’être. Merci aux amies qui nous accompagnent pour ton dernier voyage dans lequel Arthur, ton doudou, t’accompagnera à jamais.
Nous t’embrassons avec tout notre amour, notre reconnaissance malgré notre infinie tristesse.
Je t’aime, je t’aime, je t’aime ma Chipette d’amour
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Chipie
(18 octobre 2007 – 9 mars 2016)